- Le Contexte -

« Mourir est passivité, mais se tuer est acte. »
André Malraux

Sombre. Telle devait être cette nuit. La brume en avait fait son nid. Triste et voluptueux. Seule la lune ébranlait avec sa clarté indécente, sa forme ovoïde proprement scandaleuse. Les branches d'un saule projetaient leur ombre sur le drap, froissé et crasseux. L'humidité s'était chargée de l'étouffer. Tout jeune nourrisson qu'il était, il avait lutté. En vain. On sentait bien, sous sa peau livide, le sang geler. Il ne criait plus, proie d'une lente agonie.
« Sainte Marie mère de Dieu ! »
Le silence fut brisé. Encapuchonnée, la nonne plia les jambes vers le délaissé. Lui, entre la fine commissure de ses paupières, ne voyait rien. Aveugle, condamné et atrophié.
Miséricordieuse, elle le berça au creux de son sein, un sourire carnassier aux lèvres.
« Adriel. »



Le sort ne l'épargnait pas. Dans sa course, ses pieds nus claquaient sur le sol carrelé. Sur son front, des électrodes. Et, plantées dans ses poignées, des perfusions. Poings serrés, il n'entendait plus que sa respiration saccadée. Yeux clos, tête baissée, rien n'aurait pu l'arrêter. Il écoutait. Mieux que quiconque ici. Sa raison ? Abandonnée au profit du plus basique des instincts. Dans sa gorge: une soif intarissable. Il sent une silhouette se découper lentement au bout du couloir qu'il arpente.
« Là ! Il- ! »
Le reste se noie dans son cri. Il bouge, gesticule, tente d'arracher ces canines dans son cou. Et puis, la mort le fauche. Son corps tombe lourdement. Dans les yeux de son assassins, un éclat de plénitude pure.


« Qu'es-tu ? »
Sa voix tremble, victime, tout comme lui. Il l'a posé. LA question qui le torture. Fruit d'une expérience ? Monstre avide de sang ? Vampire. Tout juste.
Sa bouche se fend et laisse entrevoir deux rangées de dents luisantes et aiguisées.


Il avait dû la laisser à demie-morte. Le danger était trop grand pour qu'il l'encoure. Elle aurait dû mourir. Pourtant, devant son regard furibond, elle se tient droite. Vide. Il se revoit arpenter les couloirs comme un fauve avec cette lueur sauvage dans l'œil. Puis, il comprend. Ses canines ne font pas que tuer, elles créent.
Le miracle devant lui est comme lui.



Cicéron: l'origine, l'organisation créatrice des êtres comme lui.
« Elle a été, est, mais ne sera plus ! »
Il a rassemblé ses frères, ses compères dans cette usine désaffectée. Lui, le premier, ne laissera plus personne s'en prendre à son espèce. Les dernières captures ont eu raison de son silence, de sa passivité.


Prendre sa vie, capturer les siens ne leur suffisait plus, il a fallu qu'ils les assujettissent. Dorénavant, avoir sa confiance relève de la prouesse. Il ne sait plus à qui se fie alors il ne se fie qu'à ses bras droits et n'a d'objectif que la victoire. Cette guerre sera sa réussite. Et ce ne sont ni les monstrueux scientifiques de Cicéron, ni ces buveurs de sang vaincus à leur service qui l'arrêteront.


L'organisation Cicéron a été fondé en 1651. Ses fondateurs voulaient améliorer l'espèce humaine et l'aider à vaincre la mort. Adriel fut leur premier cobaye humain. Quand celui-ci s'échappa, sa mutation était complète. Humain il était, vampire il est devenu.
Chassé, il est resté longtemps caché avant de comprendre la puissance de son immortalité. Le poids de la solitude devenant trop lourd, il créa son propre clan. Seulement, Cicéron captura certains de ses membres et, après quelques années d'expérimentation supplémentaires, elle parvint à les priver de leur libre arbitre. Depuis, ces vampires-là œuvrent pour eux. Cicéron n'a plus qu'un seul but: retrouver Adriel, l'expérimentation qui leur a échappé. Quant à lui, il exige vengeance. L'année 2051 risque de secouer la ville de Londres.

To be continued ?